• ce qu'il va falloir changer

    Le rôle de l’élevage industriel

    En 1997, un virus de grippe aviaire appelé H5N1 est apparu dans des élevages intensifs de poulets à Hong Kong et a tué quatre personnes. Les autorités de Hong Kong ont alors décidé de tuer tous les oiseaux d’élevage du territoire, poulets, canards, oies, pigeons, cailles. Soit 1,5 million d’oiseaux. Le virus a continué de circuler sur des camions mal nettoyés et chez des oiseaux migrateurs, par exemple des canards sauvages, contaminant d’autres élevages à travers le monde. En 2005-2006, une centaine de personnes sont mortes de ce virus très dangereux, mais heureusement presque sans transmission d’humain à humain. D’abattage en abattage, des centaines de millions d’oiseaux d’élevage ont été tués en prévention.

    Je reprends ici les mots de François Renaud, biologiste au CNRS :

    « À l’origine, H5N1 est un virus d’oiseau extrêmement virulent, mais peu efficace à l’état sauvage : il tue son hôte, l’oiseau, très rapidement, d’où une transmission à d’autres hôtes limitée. C’est l’élevage industriel qui a créé les conditions de son succès, grâce à une concentration exceptionnelle d’oiseaux et une promiscuité des volatiles favorisant la transmission du virus. Le passage à l’homme, malgré la barrière inter-espèces, a fini par se faire du fait de cette concentration de volailles en un seul endroit et de conditions sanitaires dégradées. C’est un jeu d’essai-erreur : en théorie, le virus aviaire n’est pas transmissible à l’homme, mais à force d’essayer, il finit par passer [9]. »

    Élevage industriel de poulets en France, conséquence des traités européens, productivistes. Image L214 Éthique & Animaux.

    En 2009-2010, une pandémie globale de grippe A H1N1 a fait quelques centaines de milliers de morts (ce qui est comparable à une grippe classique à l’échelle mondiale).

    Biologiquement, ce virus est une recombinaison d’un virus humain, d’un virus d’oiseau et de deux virus de porcs. Rappelez-vous : la ministre de la Santé Roselyne Bachelot s’était rendue célèbre pour l’achat déraisonnable de dizaines de millions de doses de Tamiflu, pour un coût extravagant se rapprochant du milliard d’euros, au bénéfice de grandes sociétés pharmaceutiques (en l’espèce les laboratoires Roche et Gilead Sciences). Doses qui finirent détruites pour l’essentiel. La principale théorie sur l’apparition de cette grippe H1N1 est que le virus serait apparu dans un grand élevage de porcs au Mexique, avant de contaminer des humains [10].

    Actuellement sévit une épidémie animale (épizootie) porcine qui épargne l’homme, la PPA, véhiculée par les sangliers. Originaire d’Afrique, cette peste porcine s’est propagée en Europe de l’Est au cours des années 2010, d’élevage en élevage, donnant lieu à des abattages massifs de cochons et à des campagnes de chasse au sanglier à large échelle. Ainsi, des centaines et des centaines de milliers d’animaux ont été tués préventivement. La Chine a été très touchée par la peste porcine en 2019. Des millions et des millions de cochons auraient été tués. La France n’est pas encore touchée mais reste vigilante : notre voisin belge connaît des cas depuis deux ans [11].

    Fin mars 2020, l’Organisation mondiale de la santé animale a indiqué qu’un foyer de grippe aviaire H5N8 hautement pathogène avait été confirmé en Allemagne, dans un élevage de dindes de reproduction, tout près de la frontière avec les Pays-Bas. Immédiatement, il a été décidé de tuer 10 000 oiseaux. Début avril, un autre foyer est apparu dans le centre du pays concernant 20 000 volatiles [12].

    Dans son numéro de juillet-septembre 2009, le magazine l’Écologiste expliquait que « l’élevage concentrationnaire des animaux favorise les recombinaisons de virus ». En effet, dans les élevages où les animaux sont très nombreux, les virus prospèrent, mutent, et acquièrent une certaine variété, ce qui rend les vaccins moins efficaces.

    Pour résumer, on distingue au moins trois causes à ces virus successifs :

    1. la pression écologique sur les milieux naturels et sauvages, lorsque des humains empiètent sur la nature sauvage;

    2. les marchés humides et le fait de manger des animaux sauvages ou des animaux d’élevage en contact direct avec des animaux sauvages;

    3. l’élevage d’animaux (oiseaux, cochons ou autres) très intensif ou concentrationnaire.

    Tant que cela n’aura pas été compris, on combattra la conséquence, c’est-à-dire la survenue plus ou moins régulière de virus plus ou moins dangereux, et non les causes.

    Aussi, en ne combattant pas les causes, on s’expose à l’émergence d’un nouveau virus qui, pour le plus grand malheur de l’humanité, pourrait être à la fois très mortel, très contagieux et sans vaccin.

    L’UPR exprime ici son attachement profond à s’attaquer aux causes, et non seulement aux conséquences.

    Comme très souvent, l’appartenance à l’Union européenne est une entrave à la prise en compte sérieuse de ces causes.

    Le programme de l’UPR prévoit expressément de :

    • Mettre un terme au mouvement de gigantisme des élevages industriels. Depuis 1962, le premier objectif de la politique agricole commune, inscrit dans les traités européens, est l’accroissement perpétuel de la productivité, ce qui a conduit et conduit encore à la massification illimitée de la production de viande dans d’immenses unités industrielles. Ceci est valable pour l’agriculture conventionnelle, mais aussi pour l’agriculture biologique. Par exemple, la réglementation européenne n’impose aucune limite de taille pour les élevages de pondeuses bio. En France, actuellement, se multiplient les projets de poulaillers à 12 000 ou 24 000 poules, voire 100 000 comme en Italie [13]. On voit même des projets d’élevages concentrant 200 000 oiseaux. Ces fermes géantes sont une application régulière des traités. À l’UPR, nous voulons au contraire poser des limites de taille, et aller vers des fermes moins productives, mais plus nombreuses, plus familiales, plus autonomes et plus résilientes.
    • Poursuivre les efforts déjà accomplis par nos éleveurs pour réduire leur usage d’antibiotiques, de vaccins et de produits pharmaceutiques. Par ailleurs, nous avons l’intention de conserver les règles d’hygiène usuelles.

    • Privilégier les élevages de races locales, les élevages de terroir ancrés localement, et la diversité génétique des animaux d’élevage. En effet, la quête effrénée de productivité a poussé à sélectionner uniquement les espèces les plus rentables, et les espèces rustiques disparaissent. Pire, au sein des espèces sélectionnées pour leur rendement, on a sélectionné les individus les plus productifs. Malgré un grand nombre d’individus, on se trouve alors avec des espèces sans diversité génétique, que certains spécialistes de génétique qualifient de « virtuellement éteintes » [14]. À l’opposé, nous pensons qu’il est très souhaitable que les cochons corses soient génétiquement différents des cochons provençaux, eux-mêmes différents des cochons du Sud-Ouest, eux-mêmes différents des cochons du Berry, et ainsi de suite. De façon plus générale, nous militons, à l’UPR, pour favoriser une agriculture paysanne de terroir, ainsi que le veulent les Français, et pour donner la priorité à l’objectif de biodiversité sur l’objectif de productivité.
    Plusieurs espèces de vaches du pays de Bresse ont disparu au cours du XXe siècle. La Fémeline et la Gessienne ont disparu dans les années 40. La Mézine a disparu vers 1975. Une des raisons de ces disparitions est la doctrine de simplification agricole liée à la recherche de productivité prolongée et verrouillée par l’Union européenne. Image Wikipedia.
    • Restreindre quantitativement le commerce mondial, au moins pour la partie française. Les échanges commerciaux très intenses avec la Chine ont été un facilitateur de la propagation du virus.

    • Démondialiser, c’est réduire la propagation des virus. Il ne s’agit pas d’autarcie, mais seulement de n’avoir plus pour objectif la maximisation du commerce transfrontalier (c’est un objectif des traités européens) et de souhaiter une série de relocalisations d’activités.

      En particulier, nous sommes attachés aux idées d’autonomie alimentaire et d’autonomie stratégique. Préserver les espaces naturels, à la fois sur le territoire français, avec par exemple une gestion exemplaire des parcs naturels et leur extension, mais aussi à l’international, en refusant de provoquer ce que l’on appelle la déforestation importée [15].

      La politique européenne en faveur des biocarburants est un exemple typique de cette déforestation importée : lorsque vous faites le plein de votre voiture, vous mettez malgré vous de l’éthanol (E10, E85) et de l’huile de palme (diesel) dans votre réservoir, ce qui contribue à la déforestation en Amazonie et dans le Sud-Est asiatique.

      De même, les accords de libre-échange passés par l’Union européenne (qui dispose de la compétence exclusive dans ce domaine) font peser des menaces importantes sur la biodiversité des pays concernés [16].

      Nous souhaitons mettre fin à ces politiques délirantes et contradictoires, guidées uniquement par des intentions mercantiles, et, en définitive, l’appât du gain, quelles qu’en soient les conséquences écologiques.
    Déforestation en Indonésie liée aux plantations de palmiers à l’huile par la multinationale Cargill. L’huile de palme est légèrement moins chère que les huiles concurrentes. Les importations européennes d’huile de palme (agrocarburants, utilisation alimentaire) encouragées par le mercantilisme de l’Union européenne causent, entre autres dégâts, la destruction de l’habitat de grands singes et l’érosion des sols. Image Rainforest Action Network


    Pour conclure, il est évidemment nécessaire de critiquer les incroyables ratés du président Macron et l’incompétence de son gouvernement, et de se focaliser sur l’urgence du moment : aider le personnel soignant, sauvegarder l’efficacité du système de soins français, soigner les Français malades.

    Toutefois, il est également nécessaire de prendre du recul, et de comprendre que ces pandémies ne sont pas le fruit du hasard ni d’une malédiction du ciel.

    Si l’émergence et la propagation de virus est un phénomène impossible à supprimer en tant que tel, les grandes pandémies sont en revanche grandement favorisées par un modèle de développement déraisonnable qui, lui, est évitable. Un modèle malheureusement mondial, mais dans lequel l’Union européenne a une grande part de responsabilité. Un modèle aux graves dérives dans lequel nous resterons piégés tant que nous resterons dans l’Union européenne.

    Avec bien plus d’adhérents que EELV, avec un projet d’écologie populaire, avec une vision écologique qui identifie les points de blocage majeurs que constituent l’Union européenne et la mondialisation folle, l’UPR est de loin le premier parti écologiste de France.

    Jérôme Yanez,
    Responsable national de l’UPR
    sur les questions écologiques
    17 avril 2020

    « à diffuser un max !!fumer protège du coronavirus »
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